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Le jeu sacré du peuple maya




Enviado por nicolas.balutet



Partes: 1, 2

    Indice
    1.
    Introducción


    3. Le jeu et les
    joueurs

    4.
    Les r_gles du jeu de
    balle

    5.
    La balle

    6. Les
    joueurs

    7. Les sculptures du
    terrain

    8.
    Les marqueurs

    9. Les sculptures _
    tenon

    10.
    Les anneaux

    11. Les
    panneaux

    12. Le terrain et le
    Cosmos

    13. Le terrain, image du
    Cosmos

    14. Les structures associées aux
    terrains

    15.
    Conclusion

    16.
    Bibliographie

    17. Notas

    1.
    Introducción

    Actualmente, Nicolas Balutet es profesor de espa_ol por
    el "Lycée Marc Bloch" de Bischheim (Estrasburgo, Francia).
    Especialista en Historia de la América
    precolombina así como en Literatura hispanoamericana,
    es el autor de varios artículos entre los cuales destaca
    "Etude d’un document ethnographique: Le Popol Vuh et le jeu
    de balle dans l’aire maya",
    Cahiers Ethnologiques. Histoires et Cultures, "Sentiers sans
    Maîtres", Bordeaux, n°21 (Nouvelle Série), 1999,
    pp. 15-28. Está preparando un estudio sobre la homosexualidad
    amerindia en las crónicas del Nuevo Mundo.

    Résumé. _ Plus qu’un
    simple sport, le jeu de balle tel qu’il était
    pratiqué dans l’aire maya avant la conqu_te
    espagnole, possédait une dimension religieuse. A travers
    l’étude du mythe maya-quiché – le Popol Vuh –
    et de divers éléments directement liés aux
    terrains et au jeu, sont analysés ici trois aspects
    fondamentaux du symbolisme du jeu de balle: l’importance
    des astres – le Soleil et la Lune -, le cycle du ma_s et la
    pratique du sacrifice par décapitation.

    Resumen. _ Más que un deporte, el juego de
    pelota practicado en el área maya antes de la conquista
    espa_ola, poseía una dimensión religiosa. A
    través del análisis del mito
    maya-quiché – el Popol Vuh – y de diversos elementos
    vinculados directamente a los terrenos y al juego, se analizan
    aquí tres aspectos fundamentales del simbolismo del juego
    de pelota: la importancia de los astros – el Sol y la Luna
    -, el ciclo del maíz y el uso del sacrificio por
    decapitación.

    "The ballgame is a national pastime that is almost a
    national religion. It is many things to many people. To the
    school child it is only a game. To the gambler it is a system of
    probabilities or odds arrived at after methodical consideration
    of batting averages, left-handed pitchers, weather conditions,
    and stadium construction. To the professional player it is a
    business. To the coach it is a science. To the Americanist it is
    a link with the past".

    Charles Wicke

    2. Table des
    mati_res

    Le cél_bre anthropologue suédois Sigvald
    Linné disait que "le passé est comme un livre o_ il
    y a beaucoup de pages blanches et o_ d’autres sont
    difficiles _ déchiffrer". C’est
    précisément une de ces pages, intitulée "le
    jeu de balle", que j’ai essayé de lire. Page
    centrale, le jeu de balle constitue, pour reprendre
    l’expression de Nicholas Hellmuth, une véritable
    coupe transversale des cultures méso-américaines.
    En effet, l’épigraphie, l’iconographie, la
    cosmologie, l’archéoastronomie ou bien
    l’architecture ne forment qu’une seule et m_me
    équipe sur le terrain, faisant du jeu de balle le lieu de
    rencontre des différents champs d’étude
    d’une culture. Il ne s’agit donc pas seulement
    d’un sport comme l’on serait tenté de penser
    au premier abord. Bien que cette facette ait existé
    _ c’est d’ailleurs le seul aspect qui
    perdure de nos jours _, le jeu de balle était
    une activité beaucoup plus complexe car il avait trait
    directement _ la religion et aux idées cosmologiques des
    peuples méso-américains. C’est sur ce point
    que se centre la présente étude; autrement dit,
    j’ai cherché _ définir le ou les symbolismes
    du jeu de balle.

    Comme la Méso-Amérique est une aire tr_s
    importante, et indépendamment de préférences
    personnelles, j’ai souhaité limiter mon travail _
    l’étude du symbolisme du jeu de balle dans
    l’aire maya. En effet, cette culture présente
    l’évident avantage d’avoir traversé les
    trois périodes fondamentales de l’Histoire de
    l’Amérique préhispanique, c’est _ dire
    le Préclassique, le Classique et le Postclassique. La
    plupart des autres cultures méso-américaines
    connurent une durée d’existence moindre et
    occup_rent un espace plus réduit. L’aire maya permet
    ainsi de pouvoir mieux apprécier les évolutions du
    jeu.

    Depuis une vingtaine d’années, les
    connaissances relatives au jeu de balle tel qu’il
    était pratiqué dans l’aire maya avant la
    conqu_te espagnole ont sensiblement progressé tant par la
    tenue de nombreux colloques et symposiums internationaux que par
    les recherches archéologiques in situ. Bien que les
    chercheurs nord-américains et mexicains aient
    apporté l’essentiel de ces nouvelles données,
    la France n’est cependant pas en reste car Eric Taladoire,
    professeur _ l’U.F.R. d’Art et
    d’Archéologie de l’Université de Paris
    I, est, _ l’échelle mondiale, l’un des plus
    éminents spécialistes du jeu de balle. Sa th_se
    doctorale, publiée en 1981, reste d’ailleurs _ ce
    jour l’analyse la plus compl_te sur le sujet.

    Parmi ces nouveaux renseignements, j’utiliserai
    principalement les données provenant de l’aire maya,
    mais je ne m’interdirai pas, le cas échéant,
    de faire appel _ celles d’autres peuples
    méso-américains. Les ressemblances ou
    différences pourront en effet _tre fort utiles. Notons
    d’ailleurs que si le Mayab est riche en
    éléments sculpturaux, il n’en va pas de m_me
    pour les documents du type codex. L’étude des
    données du Mexique central et de la côte orientale
    aideront _ mieux cerner le jeu de balle.

    Cet essai comprend trois parties: "Le jeu et les
    joueurs" dans laquelle j’analyse essentiellement les
    instruments et les v_tements des joueurs (balle, jougs, haches,
    palmes, pierres _ main); une deuxi_me partie consacrée _
    l’étude des quatre types de sculptures directement
    liées aux terrains de jeu de balle; et enfin, "le terrain
    et le Cosmos" o_ j’essaie de montrer que le terrain
    n’est pas un simple stade mais plutôt un temple.
    C’est une étude sensiblement orientée vers
    l’analyse iconographique et architecturale. Cependant, je
    mettrai aussi _ profit un petit texte sacré comprenant les
    idées cosmologiques des Mayas: le Popol
    Vuh.

    La présente publication poursuit deux objectifs:
    apporter des réponses concernant le symbolisme du jeu de
    balle dans l’aire maya, et permettre au plus grand nombre
    _ je pense en particulier aux étudiants
    _ de découvrir, _ travers un aspect particulier
    de la culture maya, ce peuple fascinant et, au del_, la
    Méso-Amérique préhispanique. Ma propre
    expérience m’a encouragé dans cette voie. En
    effet, alors que je souhaitais aborder la Gr_ce antique pour les
    besoins d’un projet d’étude
    américaniste, je me vis confronté aux limites
    qu’imposent mes connaissances dans ce domaine, tant au
    point de vue géographique que historique et linguistique.
    C’est pourquoi, je propose au lecteur novice de nombreuses
    explications en notes ainsi qu’un glossaire _ la fin de cet
    ouvrage afin qu’il puisse suivre les idées et
    qu’il ne se trouve pas dérouté face _ des
    termes ou des notions inconnus.

    Aussi, commençons par déterminer les
    cadres géographique et temporel. La premi_re
    difficulté que rencontre toute personne
    intéressée par la culture maya réside dans
    la délimitation du Mayab. En effet, les chercheurs
    n’arrivent pas _ se mettre d’accord sur
    l’extension territoriale occupée par les Mayas _
    l’époque préhispanique. Tout dépend en
    fait des crit_res que l’on consid_re: archéologiques
    ou linguistiques. Je ne veux pas entrer dans le débat mais
    retenir comme base géographique pour cet essai la
    combinaison de ces deux crit_res. Ainsi l’aire obtenue
    s’étend sur un territoire de quelque 325.000
    km2, comprenant les actuelles républiques du
    Guatemala et
    du Belize, les états mexicains de Yucatán, Quintana
    Roo et Camp_che, la moitié orientale des états de
    Tabasco et Chiapas, ainsi que les bordures occidentales du
    Honduras et du Salvador.

    L’occupation de ce territoire est tr_s ancienne,
    et date de la période lithique avec l’arrivée
    de bandes de chasseurs-récolteurs. Cependant, c’est
    seulement _ partir du premier millénaire avant
    Jésus-Christ que l’on peut parler
    véritablement de "culture maya". Pour établir les
    grandes périodes temporelles de cette aire se pose le m_me
    probl_me que pour le cadre géographique. Le tableau
    synoptique ci-dessous expose néanmoins la classification
    la plus simple, et _ la fois la mieux acceptée par les
    spécialistes:

    Préclassique Ancien: 2000/1000 avant
    J.C.

    Préclassique Moyen: 1000/400 avant
    J.C.

    Préclassique Récent: 400 avant J.C./200
    apr_s J.C.

    Classique Ancien: 200/400 apr_s J.C.

    Classique Moyen: 400/600 apr_s J.C.

    Classique Récent: 600/900 apr_s J.C.

    Postclassique Ancien: 900/1200 apr_s J.C.

    Postclassique Moyen: 1200/1450 apr_s J.C.

    Postclassique Récent: 1450/1552 apr_s
    J.C.

    Enfin, avec la permission de l’aimable lecteur, je
    souhaiterais remercier Maurice Birckel, María Jesús
    Mejías Alvárez, Nélida Gliemann et Manuel
    del Pozo Redondo qui m’ont apportées leur aide,
    soutien profitable et enrichissant en m_me temps que sinc_re et
    désintéressé.

    3. Le jeu et les
    joueurs

    Le jeu

    L’origine du jeu de balle

    Parler de l’origine du jeu de balle suppose que
    dans toute la Méso-Amérique, il n’y ait eu
    qu’une façon de jouer _ la balle : or cela est faux.
    L’exemple de Teotihuacán est
    révélateur _ ce sujet. En effet, les joueurs de
    cette Cité-Etat utilisaient des battes pour renvoyer la
    balle comme le démontrent les peintures du Tlalocán
    _ Tepantitla. L’espace de jeu était quant _ lui
    délimité par des st_les comme celle de La Ventilla.
    Rien de commun avec le jeu pratiqué dans l’aire maya
    o_ il était interdit de toucher la balle avec les mains ou
    les pieds, et qui se déroulait dans des terrains
    spécialement aménagés. De plus, sur une m_me
    aire culturelle, le jeu a pu évoluer au cours du temps ou
    selon les régions. Par exemple, la péninsule du
    Yucatán présente des terrains avec des anneaux,
    élément inconnu dans le reste du Mayab et qui
    introduisit une variante dans la mani_re de jouer. Aussi, il est
    impropre de parler d’un jeu de balle alors qu’il
    existait des jeux de balle. Dans ce contexte, peut-on dire que
    tous les jeux de balle de Méso-Amérique ont la m_me
    origine ?

    Les premi_res traces de jeu de balle proviennent de
    figurines. Arturo Oliveros a découvert un groupe de huit
    figurines en terre cuite trouvées dans une tombe _ El
    Ope_o (Michoacán, Mexique), et datant du
    Préclassique ancien (1500 av. J.C.). Cinq hommes jouent _
    la balle avec une sorte de bâton et trois femmes sont
    spectatrices. Cette sc_ne est la représentation la plus
    ancienne trouvée jusqu’_ présent. A Xochipala
    (Guerrero, Mexique), une figurine de joueur datant elle aussi du
    Préclassique a été trouvée, mais
    c’est dans l’altiplano mexicain, _ Tlatilco (Mexico
    D.F.) notamment, que le plus grand nombre de figurines fut
    découvert. Aux côtés des "mujeres bonitas"
    des joueurs arborent leur tenue caractéristique ou
    tiennent une balle dans la main. Ces découvertes sont _
    rapprocher de la zone olm_que car vers le Préclassique
    moyen l’altiplano subit l’influence de ce peuple de
    la côte du golfe du Mexique. Ce qu’il y a de commun _
    tous les jeux, c’est la balle de caoutchouc. Or, les
    Olm_ques, dont le nom signifie littéralement "les
    habitants du pays du caoutchouc", vivaient dans la principale
    région productrice de cette mati_re. De m_me, le plus
    vieux terrain connu appartient au site de La Venta (Tabasco,
    Mexique), et d’aucuns ont cru voir dans les magnifiques
    t_tes colossales l’image de joueurs de balle
    décapités. Ajoutons _ cela leur réseau
    commercial tr_s étendu et le fait que la culture olm_que
    soit la "culture m_re" de Méso-Amérique; d_s lors
    il me semble correct de penser que les jeux de balle n’ont
    eu qu’une seule et m_me origine. Les différences
    proviendraient des particularités de chaque région
    et de chaque culture qui aurait adapté le jeu selon ses
    propres crit_res. De la zone olm_que, le jeu de balle avec les
    idées religieuses et symboliques qui lui sont
    rattachées se serait propagé _ l’aire maya o_
    il connut le plus bel essor. Sans doute la culture maya,
    l’une des cultures les plus riches et impressionnantes au
    monde, sut le magnifier. L’aire maya compte ainsi le plus
    grand nombre de terrains de toute la
    Méso-Amérique.

    4. Les r_gles du jeu de
    balle

    Bien que le jeu de balle pratiqué dans
    l’aire maya ait pu varier dans le temps et dans
    l’espace, il est possible de systématiser un certain
    nombre de r_gles. Ainsi, ce jeu opposait deux équipes qui
    se disposaient _ chaque bout du terrain, de part et d’autre
    d’un axe transversal qui servait de ligne centrale. Ce jeu
    était difficile car les joueurs ne pouvaient toucher la
    balle qu’avec les genoux, les coudes, les hanches ou les
    fesses, mais surtout pas avec les mains ou les pieds, ce qui
    aurait rendu le jeu beaucoup plus facile.

    Le compte des points, dont le nombre était
    fixé d’un commun accord entre les joueurs avant une
    partie, se résume de la façon suivante:
    lorsqu’une équipe ne renvoyait pas la balle
    correctement (si elle sortait de l’aire de jeu ou
    qu’un joueur la touchait avec une partie du corps
    interdite), elle perdait un point au bénéfice de
    l’équipe adverse qui en gagnait un. Le compte des
    points dépendait donc uniquement des fautes de chacun,
    excepté dans le cas o_ le terrain possédait des
    anneaux. Dans ce cas-l_, comme l’ont abondamment
    décrit les chroniqueurs, la victoire était
    accordée automatiquement _ l’équipe dont le
    joueur avait réussi l’exploit tr_s rare – pour ne
    pas dire impossible – de faire passer la balle dans
    l’anneau correspondant _ son camp, et cela quel que soit le
    score _ ce moment-l_ de la partie.

    Mena et Jenkins mentionnent l’existence de
    "Veedores del Juego", c’est _ dire des arbitres dont le
    rôle était de veiller au bon déroulement du
    jeu et de régler d’éventuels litiges.
    J’admets volontiers leur présence, mais
    j’ajouterai qu’il devait sans doute s’agir de
    pr_tres. En effet, astreints _ la recherche de la pureté
    avec tout ce que cela implique, les religieux étaient les
    seules personnes impartiales et capables de traduire le
    résultat de la partie.

    Les pr_tres ainsi que les rois et les
    personnalités importantes observaient le jeu depuis la
    partie supérieure des structures latérales et
    terminales du terrain. Notons d’ailleurs que des temples et
    divers bâtiments appelés superstructures
    étaient construits sur de nombreux terrains de jeu de
    balle.

    Le Popol Vuh

    Il existe peu de documents mayas nous renseignant sur le
    jeu de balle. Les quelques codex mayas qui ont survécu _
    la conqu_te et _ la folie destructrice des
    ecclésiastiques, n’apportent rien sur cet aspect de
    la culture maya. Cependant, un petit livre contenant les
    idées cosmologiques du peuple quiché est parvenu
    jusqu’_ nous: le Popol Vuh. Rédigé apr_s la
    conqu_te espagnole, il s’agit un texte sacré
    (d’aucuns l’appellent la "Bible" quiché) qui
    renferme de nombreuses informations sur le jeu de balle et son
    symbolisme, ainsi que sur la mani_re de jouer. Dans la partie
    intitulée "Troisi_me Création", le jeu de balle
    constitue le point central du mythe que l’on peut
    résumer de la mani_re suivante:

    Alors que sur terre les deux jumeaux Hunhunahpú
    et Vucub Hunahpú jouent _ la balle, les seigneurs du Monde
    Inférieur les convient _ descendre _ Xibalbá pour
    jouer avec eux. Une fois arrivés sur place,
    Hunhunahpú et Vucub Hunahpú subissent une dure
    série d’épreuves qui leur co_tera la vie.
    Leur corps sont enterrés, exceptée la t_te de
    Hunhunahpú qui est suspendue _ un arbre. D_s lors cet
    arbre, un calebassier, poussera et donnera de nombreux fruits
    parmi lesquels la t_te de Hunhunahpú passera
    inaperçue. Désobéissant _
    l’interdiction de s’approcher de l’arbre,
    Xquic, la fille d’un des seigneurs, tombe enceinte apr_s
    que le crâne de Hunhunahpú lui ait craché
    dans la main. Elle échappe de peu aux représailles
    de ses semblables, et se réfugie chez sa belle-m_re. Sur
    terre, elle donne naissance _ des jumeaux, Hunahpú et
    Xbalanqué. Aidés par une souris, ces derniers
    récup_rent l’équipement de leurs p_re et
    oncle et se mettent _ jouer _ la balle. De nouveau, les seigneurs
    de Xibalbá entendent le bruit, et les convient _ descendre
    dans le Monde Inférieur. Ils subissent alors les m_mes
    épreuves que Hunhunahpú et Vucub Hunahpú,
    mais arrivent _ déjouer tous les pi_ges tendus par leurs
    adversaires. Les deux équipes se mettent _ jouer _ la
    balle et les jumeaux perdent; néanmoins ils gardent la vie
    sauve car ils arrivent _ payer l’enjeu aux seigneurs du
    Monde Inférieur. De nouvelles épreuves les
    attendent et, au cours de l’une d’elles,
    Hunahpú est décapité par une chauve-souris
    vampire: sa t_te devient d_s lors la balle d’une deuxi_me
    partie de jeu. Xbalanqué arrive, par ruse, _ remplacer la
    balle par un lapin, et ressuscite son fr_re. Les jumeaux sont
    vainqueurs. Enfin, apr_s de nouvelles épreuves et de
    nouvelles ruses, les seigneurs sont définitivement vaincus
    et tués. Les jumeaux ressuscitent leurs p_re et oncle, et
    montent au ciel pour devenir l’un le Soleil, l’autre
    la Lune.

    Ce mythe est fondamental pour l’étude du
    symbolisme du jeu de balle dans l’aire maya, et je
    m’y référerai tout au long de cet essai,
    depuis l’analyse des instruments du jeu et des v_tements
    des joueurs jusqu’_ l’étude du terrain et des
    sculptures qui lui sont associées.

    5. La
    balle

    Il peut paraître surprenant que les chroniqueurs
    des Indes se soient fortement intéressés _ la
    balle, élément que l’on pourrait qualifier de
    secondaire comparé aux r_gles du jeu ou aux v_tements des
    joueurs par exemple. Cet intér_t tout particulier pour la
    balle tient principalement _ la qualité de rebond de
    celle-ci. En effet, _ l’époque de la conqu_te, les
    Européens ne connaissaient que des balles en bois, en
    cuir, en crin ou en tissu qui ne rebondissaient pas comme les
    balles indig_nes.

    Le caoutchouc: une mati_re sacrée

    La balle, dont la taille et le poids étaient
    variables,
    s’obtenait _ partir de la résine d’un arbre
    qui poussait principalement dans les terres chaudes et humides de
    la côte du golfe du Mexique. Cette résine, une fois
    traitée, donnait une mati_re appelée ollin en
    náhuatl, et que nous connaissons sous le nom de
    caoutchouc.

    Le caoutchouc s’est vu attribuer, d_s ses
    premi_res utilisations, un caract_re sacré qui tient _ ses
    propriétés exceptionnelles. En effet, il poss_de
    des vertus curatives que les indiens utilisaient pour soigner les
    malades. Ainsi, mélangé _ d’autres plantes,
    il guérissait la toux et la colique entre autres maux.
    Mais surtout, on comprend plus facilement pourquoi l’ollin
    était une mati_re sacrée en observant sa
    faculté _ rebondir. Le caoutchouc "triche avec la
    principale loi qui régit les autres solides: celle de la
    pesanteur. Jeté au sol, il rebondit, comme soulevé
    d’une force magique, presque jusqu’au point
    d’o_ il est parti". Symboliquement, le caoutchouc
    faciliterait donc le contact entre les personnes vivant sur terre
    et les divinités qui peuplent le ciel. Cette idée
    de trait d’union entre les hommes et les dieux se retrouve
    d’ailleurs lorsque les Mayas faisaient br_ler du
    caoutchouc, de l’encens et du copal: les nuages de
    fumée s’élevaient vers le ciel et
    sollicitaient la protection ou l’aide d’un dieu. Une
    telle cérémonie se pratiquait dans le cadre du jeu
    de balle, la veille d’une partie importante. Les joueurs
    déposaient leurs protections de cuir et leur balle devant
    l’âtre et invoquaient l’aide des dieux pour la
    partie du lendemain.

    La balle et les astres

    Le caoutchouc, grâce _ son extraordinaire
    mobilité, permet donc le contact entre la terre et le
    ciel. Il est légitime de se demander par conséquent
    si la balle fabriquée en cette mati_re ne symboliserait
    pas le mouvement des astres, en raison de l’analogie
    manifeste entre la rondeur de la balle et la forme des
    étoiles et des plan_tes.

    Si nous prenons le cas du soleil, force est de remarquer
    que tous les matins il semble sortir de la terre pour
    s’élever peu _ peu vers le plus haut point du ciel,
    puis redescendre et revenir s’engouffrer dans les
    profondeurs terrestres. Il apparaît que le cours du soleil
    est identique au mouvement de la balle qui s’él_ve
    tr_s haut pour retomber ensuite _ terre. La balle pourrait donc
    incarner le soleil. Cette hypoth_se se renforce lorsque
    l’on sait que pour les Chortis contemporains, le soleil est
    justement représenté par une balle, et que dans le
    Popol Vuh la t_te décapitée du jeune dieu solaire
    Hunahpú sert de balle lors d’une partie
    disputée entre les seigneurs du Monde Inférieur et
    Xbalanqué. Plusieurs éléments me font penser
    que la balle peut aussi incarner la lune. En effet, il est
    fréquent de trouver des sculptures o_ la balle prend la
    forme d’un lapin. De m_me, dans le Popol Vuh, un lapin se
    substitue comme balle _ la t_te décapitée de
    Hunahpú. Or, cet herbivore est associé par
    excellence _ la lune: les peuples méso-américains
    croyaient le voir sur la face du satellite terrestre. Ils
    faisaient le parall_le entre l’abondante activité
    sexuelle du lapin et l’influence du cycle lunaire sur le
    cycle menstruel de la femme.

    La balle et la fécondité

    La balle est aussi un symbole de fécondité
    et de fertilité. En effet, comme nous venons de le voir,
    elle peut _tre assimilée au soleil et _ la lune. Or, le
    soleil est l’astre qui permet le développement de la
    vie sur terre, et la lune a toujours symbolisé la
    fécondité en raison de sa relation avec les
    menstrues de la femme et avec les eaux germinatives et les
    marées. De plus, le mot qui signifie caoutchouc au
    Yucatán, kik (que l’on retrouve dans le nom de la
    m_re des jumeaux mythiques, Xquic), désigne aussi le sang
    et la s_ve des arbres _ qui n’est autre
    qu’un sang d’une couleur différente
    _, et par extension le sperme, autant de substances
    nécessaires _ la vie. Enfin, la balle est souvent
    comparée _ une t_te de mort ce qui rappele le sang et la
    vie car, comme nous le verrons par la suite, il ne faut pas
    considérer le sacrifice comme la mort mais comme le
    passage _ une nouvelle vie. Le plus bel exemple de balle/t_te de
    mort se trouve au centre des panneaux du terrain 2D1 de
    Chichén Itzá (Yucatán, Mexique).

    Les sacrifices par décapitation

    La justification des sacrifices humains

    On a longtemps pensé que les Mayas, contrairement
    _ leurs voisins mexicas, n’avaient jamais pratiqué
    de sacrifices humains. Cette théorie, compl_tement
    obsol_te aujourd’hui, s’appuyait sur
    l’idée qu’ils étaient un peuple
    pacifique dont la vie quotidienne était seulement
    tournée vers le travail des champs et la recherche
    astronomique. Nous savons désormais que ce schéma
    n’est qu’en partie vrai, et que la
    société maya était beaucoup plus complexe
    qu’une simple division entre agriculteurs et pr_tres. Bien
    au contraire, les sacrifices humains existaient déj_
    durant la période préclassique comme en
    témoigne la st_le 21 de Izapa (Chiapas, Mexique), et ils
    se sont intensifiés durant la période suivante pour
    culminer enfin au Postclassique sous l’influence des
    peuples mexicains.

    J’ai employé précédemment
    l’expression "peuple pacifique" _ propos de l’absence
    supposée du sacrifice humain dans l’aire maya.
    C’est une erreur… o_ plutôt une position tr_s
    eurocentriste. En effet, par notre culture, nous avons tendance _
    associer sacrifice humain _ barbarie, horreur, violence, etc. Les
    récits des chroniqueurs témoignent d’ailleurs
    de ce véritable dégo_t vis-_-vis de ces coutumes
    "diaboliques" et "barbares". Cependant pour les Mayas, le
    sacrifice humain était une pratique légitime et
    justifiée dans la mesure o_ il s’inscrivait dans la
    logique de leurs idées religieuses. Les dieux
    n’accordaient pas leur aide bénévolement, et
    avaient besoin d’offrandes pour obtenir les forces
    nécessaires _ l’accomplissement de leur tâche.
    Ces offrandes pouvaient _tre du copal, du caoutchouc, de la
    nourriture, des petits objets symboliques ou bien une substance
    chargée de puissance et de fécondité: le
    sang. Si c’est le sang qui les intéressait, pourquoi
    ne se limit_rent-ils pas aux sacrifices d’animaux? La
    réponse _ cette question tient au fait que, pour les
    Mayas, seul l’organisme humain concentrait une
    énergie qui se libérait _ la mort de
    l’individu. Mais, comme le précise Christian
    Duverger "dans des conditions de déc_s naturelles, cette
    énergie se tellurise, elle se disperse dans les
    profondeurs de la terre, cessant d’_tre utilisable par la
    société des vivants. Il faut donc trouver le moyen
    d’enrayer son évasion au moment de la mort afin de
    pouvoir capter et recycler ses vertus dynamiques". Le sacrifice
    apparaît donc comme la seule façon d’emp_cher
    cette perte d’énergie.

    Jeu de balle et décapitation

    Si l’on comprend mieux en quoi les sacrifices
    étaient importants aux yeux des Mayas – ils permettaient
    de satisfaire les exigences des dieux qui leur accordaient leurs
    faveurs en retour – plusieurs questions restent cependant en
    suspens. A quel(s) dieu(x) s’adressaient les sacrifices
    pratiqués dans le cadre du jeu de balle ?, c’est _
    dire qui étai(en)t le(s) destinataire(s), et qu’est
    ce que les Mayas en attendaient ? A cette question fondamentale
    car elle a trait directement _ la problématique de cet
    ouvrage, vient se greffer toute une série d’autres
    questions qui sont les suivantes : o_ et quand le sacrifice
    avait-il lieu ? Qui étaient le(s) sacrificateur(s) et
    le(s) sacrifié(s) ? Et comment s’agençait le
    sacrifice ? Autant de questions auxquelles il convient de
    répondre.

    Il est logique de penser que le sacrifice, acte
    sacré, avait lieu dans l’enceinte du terrain car
    cette construction, comme la pyramide échelonnée,
    reflétait l’image du Cosmos et possédait par
    conséquent elle aussi un caract_re sacré
    intrins_que. Pour _tre plus précis, le sacrifice
    s’effectuait au centre du terrain car le centre, bien
    souvent indiqué par un marqueur en pierre,
    représentait dans la cosmologie maya l’intersection
    des quatre secteurs horizontaux du plan terrestre et
    des trois niveaux cosmiques verticaux, c’est _ dire le
    Ciel, la Terre et l’Inframonde. Autrement dit, le centre
    permettait le passage d’une dimension _ l’autre de
    l’Univers. Notons d’ailleurs que des
    cérémonies, lors de l’inauguration d’un
    terrain o_ avant une partie, s’effectuaient _ cet endroit,
    et que dans les codex mexicains, nombreuses sont les
    représentations de terrains exhibant des crânes
    humains au centre.

    Le sacrificateur, selon Chauvet, est une personne _ qui
    un groupe donné reconnaît une
    légitimité dans cette fonction. Qui mieux que les
    pr_tres pouvaient jouer ce rôle ? Ces hauts personnages de
    la société maya semblent _tre, en effet, les
    personnes les plus capables pour exécuter les sacrifices,
    d’autant plus que dans d’autres contextes c’est
    toujours _ eux que l’on confie cette tâche. Les
    pr_tres assumaient parfois la fonction d’arbitre et
    interprétaient les résultats : le jeu de balle
    était ainsi une prophétie, c’est _ dire la
    révélation par inspiration divine des choses
    cachées. Les deux équipes qui s’affrontaient
    représentaient des divinités opposées
    _ par exemple dans le Popol Vuh, les forces des
    Tén_bres contre les forces de la Lumi_re _ ou
    une réponse différente _ une question posée.
    Le résultat était alors interprété
    par les pr_tres qui prophétisaient par la suite des
    événements selon l’équipe gagnante. Si
    les prophéties étaient mauvaises
    (sécheresses, inondations, maladies, etc.), on contentait
    les dieux pour éviter ces calamités au moyen
    d’offrandes et de sacrifices.

    En ce qui concerne l’identité du ou des
    sacrifiés, il s’agissait certainement des joueurs de
    l’équipe perdante ou du moins de son chef comme en
    témoignent les panneaux du terrain 2D1 de Chichén
    Itzá.

    Enfin, nous pouvons nous demander pourquoi les pr_tres
    officiaient les sacrifices liés au jeu de balle en
    utilisant la décapitation, et non pas d’autres
    techniques tout aussi spectaculaires et beaucoup plus
    utilisées (je pense notamment _ l’extraction du
    coeur). Kampen estime que l’utilisation de la
    décapitation provient de la coutume qui consistait _
    ramener la t_te des ennemis de guerre comme des trophées.
    Cela suppose que le jeu de balle possédât un
    caract_re guerrier. Or, il est vrai que sur une zone
    déterminée (le nord-ouest du Mayab) le jeu pouvait
    servir _ régler des conflits et _ réaffirmer un
    pouvoir, mais l’on ne peut pas étendre cette
    particularité _ l’ensemble de l’aire maya.
    Plus généralement, la décapitation pourrait
    _tre un moyen de remémorer le sacrifice que subit
    Hunhunahpú, lorsque lui et son fr_re Vucub Hunahpú,
    perdirent la partie de jeu de balle contre les seigneurs de
    Xibalbá. Gillepsie envisage _ ce propos que la
    décapitation renvoie _ la notion de démembrement
    (séparer le corps en plusieurs parties). La
    décapitation engendre une disjonction dans le corps, comme
    les mouvements périodiques des astres qui introduisent une
    disjonction dans le temps, séparant le Cosmos entre le
    jour et la nuit, l’été et l’hiver, la
    saison s_che et la saison des pluies, etc. Aussi peut-on imaginer
    que la décapitation, plus que tout autre moyen sacrificiel
    permettait d’entrer en contact avec les astres, et plus
    particuli_rement le Soleil et la Lune. Les dieux solaire et
    lunaire seraient donc des dieux privilégiés du jeu
    de balle. Lothar Knauth pense d’ailleurs que "el rito de
    decapitación significó el acto imitativo del drama
    cósmico cuando la luna, símbolo de la fertilidad,
    tuvo que ser sacrificada para dar paso al sol, símbolo del
    dar y del sostener de la vida". Enfin, les st_les de Santa
    Lucía Cotzumalhuapa (Escuintla, Guatemala) montrent des
    personnages v_tus comme des joueurs (peut-_tre des pr_tres)
    offrant une t_te décapitée _ des divinités
    qui descendent du ciel et qui présentent les atours
    caractéristiques du Soleil et de la Lune.

    6. Les
    joueurs

    L’identité des joueurs

    En ce qui concerne l’identité des joueurs,
    on peut d’ores et déj_ affirmer que seuls les hommes
    pratiquaient le jeu car il était tr_s rude et demandait,
    en plus de l’adresse et de l’agilité, de la
    puissance et de la résistance. Jesús Castro Blanco
    nous dit _ ce propos que " el evento era muy duro y violento, al
    grado que después de la partida, los participantes
    quedaban con un cuerpo adolorido y maltrecho. No escaseaban los
    huesos rotos,
    habiendo casos de muertes causadas por inesperados golpes en el
    estómago". Le probl_me de l’identité des
    joueurs se pose sur la question de la classe sociale. Les
    chroniqueurs sont d’accord sur le fait que les couches
    supérieures (les rois et les seigneurs) ainsi que des
    joueurs professionnels dont le statut et le prestige
    découlaient précisément de cette
    activité, intervenaient dans le jeu. De nombreuses
    représentations sculpturales montrent ainsi des rois
    habillés et agissant comme des joueurs : citons par
    exemple le roi Oiseau-Jaguar III sur la marche centrale n° 7
    de la structure 33 de Yaxchilán (Chiapas, Mexique). Les
    dieux eux-m_mes jouaient _ la balle comme le rapporte le Popol
    Vuh. Les pr_tres, au contraire, ne jouaient pas mais avaient un
    rôle clef, car ils suivaient de pr_s les aléas du
    jeu et tachaient d’en interpréter le
    résultat.

    Il ne faut pas oublier cependant que le jeu de balle
    était aussi un sport. C’est peut-_tre l’image
    qui nous vient le plus directement _ l’esprit, en pensant
    au football, au basket-ball et autres jeux de balle.
    D’autre part, c’est le seul aspect du jeu
    précolombien qui soit actuellement conservé : on le
    retrouve dans le nord-ouest du Mexique, dans l’état
    de Sinaloa principalement. Bien que cet essai tente de comprendre
    ce que signifiait le jeu de balle dans son aspect religieux et
    symbolique, il convient de préciser que toutes les classes
    sociales y avaient acc_s lorsqu’il s’agissait
    d’un simple sport. Le nombre tr_s élevé de
    terrains dans certains centres cérémoniels –
    Chichén Itzá et Kaminaljuyú (Escuintla,
    Guatemala) en ont treize, Tikal (Petén, Guatemala) en
    compte cinq – montre que, en plus du teotlachco, les hommes
    disposaient de structures o_ ils pouvaient s’adonner au
    plaisir que procure tout sport. La difficulté du jeu
    impliquait d’autre part que les joueurs qui
    interviendraient lors du jeu religieux puissent
    s’entraîner afin de se préparer physiquement.
    Lors de ces entraînements, le caract_re religieux
    était bien évidemment absent.

    Dans le codex Mendoza, on apprend que l’empereur
    mexica Moctezuma II exigeait des cités de la côte du
    golfe du Mexique le paiement d’un tribut annuel
    composé de 16.000 balles de caoutchouc. Ce chiffre qui
    donne une idée de la consommation de balles dans
    l’empire mexica sugg_re que le jeu était
    fréquemment disputé, et qu’il devait _tre
    considéré comme une distraction, un passe-temps.
    Enfin, l’existence de paris importants est propre _ la
    compétition sportive.

    Les v_tements des joueurs

    Des tenues cérémonielles ?

    L’impact d’une balle de caoutchouc dont le
    poids pouvait atteindre plus de trois kilos obligea les joueurs _
    se couvrir certaines parties du corps pour se protéger des
    coups. Les tenues étaient variées, mais l’on
    peut déterminer quelques constantes. Ainsi, les joueurs
    adopt_rent souvent des protections aux genoux et aux coudes, et
    parfois m_me des gants et une sorte de casque dont il est fait
    mention dans le Popol Vuh. C’est sur les hanches que se
    portait néanmoins la protection la plus importante et _ la
    fois la plus problématique. Elle pouvait _tre de deux
    sortes :

    *1. La protection était une simple ceinture de
    cuir ou de bois qui reposait sur les hanches et protégeait
    le ventre. Elle porte le nom de "joug".

    *2. La protection était beaucoup plus
    épaisse que la précédente et couvrait non
    seulement les hanches et le ventre mais aussi le
    torse.

    Il saute aux yeux, en regardant les joueurs qui portent
    cette derni_re protection, que leur tenue d’ensemble est
    plus élaborée : ils arborent des colliers, des
    panaches de plumes et de drôles de coiffures zoomorphes.
    Par exemple, sur un vase du Petén, un joueur porte une
    coiffure en forme de t_te de héron ou de cormoran. Un tel
    équipement était parfaitement encombrant et devait
    peser lourd, c’est pourquoi je pense qu’il ne
    s’agissait pas d’une tenue que portaient les joueurs
    pendant la partie elle-m_me, mais plutôt avant ou apr_s un
    match, une tenue cérémonielle en somme. La veille
    ou avant le début d’une partie, les joueurs
    pouvaient mettre ces tenues d’apparat, et présenter
    des offrandes aux Dieux (ce qui est confirmé par les
    chroniqueurs), ou bien défiler dans la pure tradition du
    spectacle sportif. Les rois, qui jouaient _ l’occasion,
    portaient aussi des tenues identiques. Enfin, m_me s’il est
    avéré que les pr_tres ne jouaient pas, je suis
    convaincu que parmi ces peintures et sculptures se cachent de
    nombreux membres de la caste sacerdotale. Il suffit, en effet, de
    s’appuyer sur les sc_nes de sacrifice et de
    décapitation exécutées par des personnages
    v_tus de ces tenues opulentes. Le chef ou les autres joueurs
    d’une équipe ne pouvaient _tre en aucun cas les
    sacrificateurs, car ce n’était pas _ eux
    qu’incombait cette tâche. Seuls les pr_tres, en tant
    que garants du rituel et médiateurs entre les dieux et les
    hommes, étaient _ m_me de s’occuper de ces
    sacrifices. Allen Wardwell remarque d’ailleurs que les
    coiffures zoomorphes en forme d’oiseaux étaient
    l’apanage des pr_tres et des guerriers.

    Si ces v_tements semblent constituer une tenue
    cérémonielle, se pose toutefois un probl_me : les
    représentations de joueurs portant ces habits ne se
    trouvent que dans les basses terres centrales et du sud, surtout
    autour des fleuves Usumacinta et Pasión. Ailleurs, dans
    les hautes terres, sur la côte pacifique ou dans la
    péninsule du Yucatán, la tenue des joueurs est plus
    dépouillée et correspond _ la protection n° 1.
    De plus, les personnages ainsi v_tus semblent faire des offrandes
    aux dieux et s’inscrivent parfois dans le cadre de
    cérémonies. L’hypoth_se de départ
    est-elle fausse ? Peut-on penser, _ l’instar de Hellmuth,
    que les Mayas du Petén (ceux qui portent les tenues
    compliquées) pratiquaient un jeu o_ la balle se tapait sur
    le thorax ? Rien n’est moins s_r car l’on a
    trouvé des jougs (protection n° 1) dans des centres
    proches de l’Usumacinta et du Pasión, _ Palenque
    (Chiapas, Mexique) et _ Copán (Honduras). Il faut en
    déduire que deux types de protection ont coexisté
    dans le coeur du Mayab: l’une pour le jeu, l’autre
    pour les cérémonies attenantes. Dans le reste de
    l’aire maya, seuls les jougs étaient
    utilisés.

    Les jougs

    La protection n° 1 s’appelle "joug" car il
    s’agit d’une pierre dure sculptée ayant la
    forme d’un fer _ cheval. Les jougs mesurent en moyenne 45
    cm. de long pour 30 cm. de large avec une ouverture comprise
    entre 16 et 18 cm. Ils peuvent peser jusqu’_ trente kilos,
    et sont décorés de t_tes de grenouilles, de
    jaguars, de serpents ou d’hommes, ainsi que de volutes. Les
    jougs sont originaires de la côte du golfe du Mexique, de
    la région totonaque (Veracruz, Mexique) o_ ils furent tr_s
    abondants durant la période classique. C’est _ cette
    époque que l’utilisation des jougs se diffuse dans
    l’aire maya en relation avec le commerce qui permet de
    multiples échanges. Mais ce ne sont pas les Totonaques qui
    les ont inventés comme en témoigne la
    découverte, en 1988, d’un joug olm_que datant du
    Préclassique ancien. Ce joug qui provient du site de El
    Manatí (Veracruz, Mexique) est une pierre taillée
    verte obscure qui mesure 38 cm. de long. Les Olm_ques auraient
    donc été _ l’origine de l’invention du
    joug, mais ce seraient les Totonaques qui, parall_lement _
    l’augmentation de l’importance du rituel du jeu de
    balle, auraient développé son utilisation et sa
    diffusion. Dans l’aire maya, les archéologues ont
    trouvé une centaine de jougs datant du Classique et
    provenant principalement de la côte pacifique.
    Récemment, une cache contenant 52 jougs en pierre a
    été découverte pr_s de Tiquisate
    (Escuintla).

    Comme je l’ai déj_ dit _ plusieurs
    reprises, le joug correspond _ la protection n° 1,
    c’est _ dire _ une simple ceinture que les joueurs se
    mettaient sur les hanches pour se protéger le ventre des
    coups provoqués par l’impact de la balle. Cette
    hypoth_se fut lancée en 1946 par Gordon Ekholm qui
    démontra que des figurines de joueurs portaient ces
    sculptures. Or, je n’ignore pas que les jougs pouvaient
    peser jusqu’_ trente kilos. La question qui se pose est de
    savoir si un tel poids rend le jeu possible. Scott et Hellmuth
    firent l’expérience et arriv_rent _ des conclusions
    différentes. Le premier reste sceptique quant _ son
    utilisation réelle dans le jeu tandis que le second
    affirme n’avoir eu aucun probl_me pour se déplacer
    avec la sculpture en pierre. J’estime pour ma part que les
    jougs en pierre n’étaient pas directement
    utilisés lors d’une partie de jeu de balle, mais que
    les joueurs se protégeaient grâce _ des
    reproductions de ces jougs en bois ou en cuir. La
    découverte d’un joug en bois par Guillemin confirme
    cette hypoth_se. De m_me, Reina de Vries a récemment
    démontré avec succ_s que des ceintures en cuir,
    identiques aux jougs en pierre, pouvaient _tre fabriquées
    en utilisant le joug comme moule. Cet objet ne serait donc
    qu’un moule ? Loin de moi cette idée. En effet,
    cette fonction n’en exclut pas d’autres. Nous pouvons
    tr_s bien imaginer que les jougs se portaient avant ou apr_s une
    partie, lors des cérémonies dont j’ai
    parlé précédemment. De m_me, le joug
    pourrait _tre un trophée, l’embl_me du jeu qui
    serait mise en valeur dans un endroit particulier du terrain. Ce
    trophée, qui ressemble _ nos coupes modernes, serait remis
    _ l’équipe gagnante _ la fin d’un match.
    Certains chercheurs ont m_me pensé que le joug serait un
    instrument servant au sacrifice par extraction du coeur. Il
    servirait _ bloquer le cou du sacrifié qui ne pourrait
    plus bouger. Une telle utilisation serait techniquement possible
    mais n’entrerait pas dans le cadre du jeu de balle, car
    seuls les sacrifices par décapitation étaient
    pratiqués lors de ce rituel. Enfin, les jougs ont
    été fréquemment associés _ des
    enterrements: c’est le cas _ Tikal et _ Toniná
    (Chiapas, Mexique). On peut penser que les grands joueurs
    étaient enterrés avec eux.

    Le joug ou sa réplique en bois ou en cuir
    n’est pas un simple objet mais poss_de aussi un symbolisme
    utile pour l’analyse du jeu de balle. L’idée
    la plus répandue est que sa forme en U représente
    la bouche de la terre. Le joueur arborant un joug se situerait
    donc _ moitié dans le Monde Supérieur et _
    moitié dans le Monde Inférieur. Il symboliserait le
    centre de l’Univers o_ se rencontrent le plan vertical (le
    joueur) et le plan horizontal (l’allée du terrain o_
    se trouve le joueur). Guillemin a découvert ainsi, sur le
    joug en bois de Tikal, des traces de trois couleurs de peintures
    différentes. Le joug avait été peint tout
    d’abord en noir (couleur que l’on peut associer au
    nadir de l’Inframonde), puis en rouge (couleur du
    zénith du Monde Supérieur) et enfin en bleu-vert,
    couleur du centre. Le noir et le rouge renvoient aussi
    respectivement _ l’ouest et l’est, lieux de la mort
    et de la renaissance du Soleil. Enfin, il convient de remarquer
    que les jougs étaient souvent fabriqués avec des
    pierres vertes (serpentine, diorite, jade). Or, il s’agit
    de la couleur du divin et du sacré et du centre de
    l’Univers dans le panthéon maya.

    Les instruments des joueurs

    L’attirail des joueurs comprenait la balle et le
    joug en pierre ainsi que d’autres objets : hache, palme et
    pierre _ main.

    Les haches

    Une hache est "un objet plat en pierre
    représentant le plus souvent une t_te _ profil double. Son
    nom vient de son bord externe qui est souvent biseauté
    comme la lame d’une hache". Ces instruments se trouvent
    fréquemment dans l’aire maya, en particulier dans la
    région de Bilbao et de Santa Lucía Cotzumalhuapa,
    ainsi qu’ _ Copán et _ Palenque.

    On consid_re généralement ces objets comme
    faisant partie des v_tements des joueurs car sur de nombreuses
    représentations iconographiques des objets ressemblants _
    des haches sont accrochés au cou ou _ la taille des
    joueurs. Je consid_re pour ma part qu’il ne s’agit
    pas d’un v_tement _ proprement parler mais d’un objet
    cérémoniel. En effet, les haches ne sont
    présentes que lorsqu’un joueur arbore un joug. Or,
    le joug en pierre était utilisé seulement durant
    les cérémonies.

    L’iconographie des haches aide _ mieux comprendre
    quelles étaient leurs fonctions dans le cadre du jeu de
    balle. Je distinguerai trois groupes: un groupe A composé
    de sculptures zoomorphes, un groupe B comprenant des sculptures
    anthropomorphes, et un groupe C que je désignerai par le
    mot-valise de "anthropozoomorphes".

    Le groupe A (sculptures zoomorphes) présente,
    comme son nom l’indique, des haches en forme de t_te
    d’animal, le plus souvent des aras et des jaguars; le
    groupe B, des t_tes humaines; et enfin, le groupe C, des
    sculptures d’animaux ayant une t_te humaine dans la gueule
    ou le bec. Les sculptures des groupes A et C pourraient _tre les
    attributs héraldiques des équipes. En effet, le
    jaguar et l’ara symbolisent respectivement le Soleil de la
    nuit et le Soleil du jour : nous avons vu
    précédemment que le jeu de balle pouvait opposer
    des équipes représentant des forces antagonistes et
    que le résultat de la partie permettait aux pr_tres de
    prophétiser des événements futurs. Les
    haches seraient une sorte de blason, d’écusson, et
    permettraient de différencier les équipes lors des
    cérémonies. Les haches du groupe B quant _ elles
    rappellent la décapitation en raison de nombreuses
    représentations de t_tes de mort et de sc_nes de
    sacrifice. Enfin, on peut imaginer que les haches se
    plaçaient sur les murs des structures latérales du
    terrain pour délimiter certaines zones ou limites. Dans ce
    contexte, elles auraient la m_me fonction que les panneaux,
    anneaux, marqueurs et autres sculptures _ tenon. Notons
    d’ailleurs que ce dernier groupe de sculptures
    présentent une forte similitude iconographique avec les
    haches.

    Les palmes

    Une palme est une pierre sculptée de forme
    évasée. Elles sont fabriquées en pierres
    volcaniques tr_s bien taillées et sont
    décorées de volutes ou bien adoptent la forme de
    corps et de t_tes humaines ou animales. Un
    trait commun _ toutes les palmes est leur base concave sur
    laquelle elles se soutiennent et qui s’ajuste _ la
    superficie incurvée des jougs. On ne les trouve
    d’ailleurs que lorsque les jougs sont présents. De
    cette constatation, on peut en déduire que les palmes
    comme les haches et les jougs sont des objets
    cérémoniels, mais préciser quelle
    était leur fonction est plus difficile. J’estime que
    les palmes pourraient symboliser la fertilité et la
    fécondité, car elles se terminent souvent par une
    t_te de serpent, symbole du sang. Leur forme évasée
    ressemble aussi _ un jet de plumes que l’on peut associer
    au sang voire au sperme, un des trois fluides vitaux. De plus, il
    convient de remarquer la forme et la position phalliques des
    palmes.

    Les pierres _ main

    Les pierres _ mains constituent s_rement les instruments
    qui posent le plus de probl_mes aux chercheurs qui
    étudient le jeu de balle [fig. 23a]. Aucun nom unanimement
    reconnu n’a d’ailleurs été
    trouvé : "manoplas", "piedras con asas" ou "candados" en
    espagnol, "handstones" ou "gloves" en anglais, les traductions
    françaises ne sont pas plus heureuses, oscillant entre
    gantelets ou pierres _ main. La seule chose dont on soit s_r, et
    que refl_tent ces noms, c’est que ces objets étaient
    tenus par la main. Ils présentent une forme rectangulaire
    ou sphérique avec une poignée, ce qui permet de les
    tenir. Les archéologues ont trouvé des pierres _
    main dans une grande partie de l’aire maya, principalement
    les régions du Petén et du nord-ouest du Mayab. De
    nombreux panneaux, dont les plus cél_bres sont ceux du
    terrain 2D1 de Chichén Itzá [fig. 23b] et des
    figurines affichent des joueurs avec cet étrange
    instrument. Quelles étaient ses fonctions ? Peu
    d’études ont été menées sur ce
    sujet, mais Stéphane de Borhegyi prétend que les
    pierres _ main servaient _ dévier la balle en donnant de
    la puissance au coup porté, et _ se protéger la
    main des lésions que pouvaient entraîner les chutes
    au sol. Ces hypoth_ses ne me convainquent pas totalement. Tout
    d’abord le jeu de balle pratiqué dans l’aire
    maya interdisait de toucher la balle avec la main (cela est
    confirmé par les textes des chroniqueurs et par de
    nombreuses sculptures et témoignages artistiques). Certes,
    le joueur muni de cet objet ne touchait pas la balle directement
    avec sa main mais le geste impliquait son utilisation.
    D’autre part, on peut se demander si les pierres _ main ne
    handicaperaient pas les joueurs. Un tel instrument pesait en
    effet plusieurs kilos : c’est pourquoi je reste sceptique
    quant _ son utilisation effective dans le jeu. Je crois
    plutôt, sans pour autant pouvoir le démonter ni
    préciser leurs fonctions exactes, que ces pierres _ main
    servaient lors des cérémonies du jeu de balle comme
    les autres instruments. Les joueurs des panneaux du terrain 2D1
    de Chichén Itzá se trouvent engagés dans une
    cérémonie et non pas dans une partie.

    7. Les sculptures du
    terrain

    Les caractéristiques des terrains

    Plusieurs modalités de jeu de balle ont
    existé en fonction des deux données : temps et
    espace. Aussi, le terrain en tant qu’ensemble de structures
    disposées de façon plus ou moins symétrique
    de part et d’autre d’une allée centrale
    était absent dans un premier temps. Son utilisation
    s’est généralisé dans toute la
    Méso-Amérique (excepté Teotihuacán)
    durant la période classique _ tel point que tous les
    grands centres cérémoniels possédaient un ou
    plusieurs terrains (Chichén Itzá en compte treize _
    ce jour). Pourtant, d_s le Préclassique ces constructions
    firent leur apparition, en particulier dans la zone olm_que, le
    lieu d’origine des jeux de balle. Le plus vieux terrain
    connu qui date de 760 avant J.C. se situe _ la Venta. Entre
    l’imposante pyramide conique et la Grande Place de la
    cité, se dressent deux longs monticules de terre
    parall_les (85 m. de long, 16 m. de large et 6 m. de haut) qui
    forment la structure primaire d’un terrain. Quant _
    l’aire maya, le premier terrain fut celui de Abaj Takalik
    (Retalhuleu, Guatemala) datant de 500 avant J.C..

    Il n’est pas étonnant que les terrains
    présentent des différences entre eux. Plusieurs
    classifications de ces structures ont été
    proposées depuis plusieurs dizaines d’années
    : la premi_re provient d’Acosta et de Moedano Koer et la
    derni_re et la plus compl_te (bien qu’obsol_te
    aujourd’hui) d’Eric Taladoire. Ce chercheur
    français, spécialiste du jeu de balle,
    détermine douze types et huit variantes pour une aire
    comprenant la Méso-Amérique mais aussi les Antilles
    et l’Arizona. Cette typologie détaillée qui
    combine l’étude du plan et du profil
    intérieur des terrains est remarquable.

    Il existe trois sortes de plan :

    * 1. Le plan ouvert : c’est le plan le plus simple
    et le plus ancien. Le terrain comporte deux plates-formes
    parall_les (structures latérales A) bordant
    l’allée F, et les extrémités sont
    ouvertes. Autrement dit, il peut exister une zone terminale G
    mais celle-ci n’est pas fermée par une structure
    terminale I. On trouve ce plan sur les terrains de Uxmal et de
    Palenque notamment

    * 2. Le plan fermé en double T : il
    présente la m_me forme que les terrains _ plan ouvert mais
    poss_de en plus des structures terminales I qui donnent au
    terrain la forme d’un double T. Le terrain 2D1 de
    Chichén Itzá en est le plus bel exemple.

    * 3. Le plan fermé en "palangana" : le plan
    rectangulaire est entouré par des murs aux quatre
    côtés. Ce plan n’est pas fréquent, sauf
    dans l’est du Guatemala o_ ces terrains en "cuvette" se
    trouvent en nombre assez important.

    Le profil, quant _ lui, correspond _ la partie
    intérieure des structures latérales. C’est
    une partie tr_s importante car les différences de profil
    peuvent _tre _ l’origine des variations du jeu. On
    dénombre pour l’aire maya quatre profils
    différents qui combinent trois éléments: la
    corniche B, le talus C et la banquette D. La corniche B est un
    mur vertical dont la hauteur varie entre 30 cm. et 7 m_tres, et
    le talus C est une surface inclinée (de 20 _ 80°). La
    banquette D est une petite plate-forme de peu de hauteur
    présentant deux surfaces : un rebord de banquette E dont
    la face peut _tre verticale ou inclinée, et une partie
    supérieure plate.

    Les quatre profils sont les suivants:

    * 1. Banquette-Talus-Corniche : ex. terrain R-11 de
    Piedras Negras.

    * 2. Banquette-Talus : ex. structure 67 de
    Yaxchilán.

    * 3. Talus-Corniche : ex. terrains K-6 de Piedras Negras
    et A de Copán.

    * 4. Banquette-Corniche : ex. terrain 2D1 de
    Chichén Itzá.

    8. Les
    marqueurs

    Les marqueurs sont des pierres taillées,
    sculptées ou non, et le plus souvent circulaires. Ils se
    trouvent sur l’allée ou bien sur les banquettes ou
    talus, parfois m_me sur la partie supérieure des
    structures latérales. Néanmoins, c’est au
    centre de l’allée que l’on recense le plus de
    marqueurs. Des hautes terres jusqu’aux basses terres
    centrales, les terrains de jeu de balle comportent tr_s souvent
    un marqueur central, seul comme c’est le cas _ Lamanai
    (Belize) ou _ los Cerritos-Chijoj (Quiché, Guatemala), ou
    associé _ d’autres marqueurs ou sculptures (tenon,
    anneaux, panneaux). Dans les basses terres du nord, seul le
    terrain du groupe des Nonnes de Chichén Itzá en
    comporte.

    Le marqueur central

    Le marqueur central servait d’autel pour les
    offrandes faites lors de l’inauguration d’un nouveau
    terrain, ou avant une partie. D’apr_s le témoignage
    de López de Gomara "cada trinquete es templo, porque
    ponían dos imágenes
    del dios del juego de pelota encima de las dos paredes más
    bajas, a la media noche de un día de buen signo, con
    ciertas ceremonias y hechicerías, y en medio del suelo
    hacían otras tales, cantando romances y canciones que para
    ello tenían (…)". La présence de caches sous le
    marqueur central de certains terrains corrobore le
    témoignage de López de Gomara. Ainsi, sur le
    terrain H6/2-3 de Toniná, les archéologues ont
    trouvé des lancettes d’obsidienne, une roche
    volcanique tr_s prisée par les membres de
    l’élite, ainsi que des petits objets symboliques, et
    sur le terrain AI de Copán, il reste des traces de feu l_
    o_ se trouvaient les marqueurs.

    Il n’est pas surprenant que de telles offrandes et
    cérémonies se déroulent autour du marqueur
    central, car il symbolise dans la cosmologie maya le Centre du
    Monde. C’était un point tr_s important car il se
    trouvait _ l’intersection des quatre secteurs du plan
    terrestre et des trois niveaux cosmiques, c’est _ dire le
    Ciel, la Terre et l’Inframonde. A cet endroit se dressait
    un arbre sacré, un ceiba, dont les racines
    pénétraient profondément dans le sol et dont
    les branches traversaient le ciel. L’utilisation d’un
    arbre comme image de l’axe du monde n’est pas propre
    _ la culture maya. On la retrouve dans d’autres cultures,
    sur le nouveau comme sur le vieux continent. L’arbre est un
    symbole cosmique car "il est vertical, il pousse, il pert ses feuilles
    et les récup_re, que par conséquent il se
    régén_re (il "meurt" et "ressuscite")
    d’innombrables fois". Autrement dit, l’arbre
    reproduit ce que manifeste l’Univers, en particulier la
    "mort" et la "renaissance" des astres. Le ceiba est un arbre
    omniprésent dans la culture maya : c’est
    d’ailleurs de nos jours l’arbre national de la
    République du Guatemala.

    Les trois marqueurs du terrain AIIb de
    Copán

    Le terrain A de Copán est en fait un triple
    terrain car il fut reconstruit par trois fois au m_me endroit,
    l’emplacement variant de quelques m_tres plus au nord. Si
    le premier et le troisi_me terrain possédaient des
    marqueurs, ce sont ceux du deuxi_me terrain qui sont les plus
    remarquables tant par leur richesse sculpturale et leur bon
    état de conservation que par ce qu’ils apportent _
    l’étude du symbolisme du jeu de balle.

    Ces trois marqueurs quadrilobés de 71 cm. de
    diam_tre datent du Classique récent. Il faut les
    considérer dans leur ensemble car ils illustrent "les
    trois actes d’un drame cosmique". La sc_ne se
    déroule dans l’Inframonde. Tout d’abord, le
    marqueur nord sert de prologue : un Seigneur du Monde
    Inférieur reçoit l’hommage d’un de ses
    coéquipiers. Il s’agit de joueurs car ils portent
    une épaisse protection ventrale ainsi que des
    genouill_res. Une énorme balle se trouve entre les deux
    joueurs, attachée par une corde. Cela rappelle le Popol
    Vuh o_ il est mentionné que la balle ainsi que les autres
    instruments des joueurs étaient accrochés _ une
    poutre du toit de la maison de la grand-m_re. La sc_ne du
    marqueur nord ne se déroule donc pas pendant le jeu mais
    bien avant une partie. Le marqueur central présente
    l’action. Claude-François Baudez pense qu’il
    s’agit de la lutte entre le roi copan_que 18 Lapin et le
    seigneur du Monde Inférieur du marqueur nord. Les glyphes
    se trouvant au dessus de la balle portent en effet le nom de ce
    souverain. Mais plus récemment, De la Garza et Izquierdo
    ont apporté un éclairage nouveau. Pour elles, la
    mention "18 Lapin" ainsi que la t_te de lapin que tient le
    personnage de droite font allusion _ la lune et _
    Xbalanqué. Le marqueur central représenterait la
    lutte mythique entre les seigneurs de l’Inframonde et
    Xbalanqué qui se retrouve seul apr_s que son fr_re
    Hunahpú se soit fait trancher la t_te par une
    chauve-souris. Pour ma part, je pense que ces deux hypoth_ses ne
    s’excluent pas l’une de l’autre car il
    était fréquent que les rois incarnent les dieux. Ce
    qui est certain c’est que cette sc_ne rappelle clairement
    le mythe quiché, d’autant plus que la balle, qui
    porte les signes de la fertilité et du soleil,
    remémore le combat dont l’enjeu était la
    renaissance de l’astre solaire. Enfin, le marqueur sud
    montre que les forces du mal ont été vaincues car
    un joueur rend hommage au jeune dieu du ma_s qui symbolise la
    fertilité. Le soleil a pu renaître et permettre le
    m_rissement de la céréale.

    Les trois marqueurs du terrain AIIb de Copán sont
    une métaphore de la lutte que doit livrer le soleil chaque
    nuit pour renaître chaque jour, et apporter la lumi_re et
    la chaleur nécessaires _ la vie représentée
    par le jeune dieu du ma_s. Ces marqueurs témoignent de
    l’extr_me relation qui unit, dans le cadre du jeu de balle,
    le symbolisme solaire au symbolisme agraire, un peu comme les
    deux faces d’une m_me réalité.

    Les marqueurs de Tenam Rosario

    La structure III de Tenam Rosario (Chiapas, Mexique) est
    un terrain exceptionnel en raison des huit marqueurs qui y furent
    découverts. J’étudierai dans ce paragraphe
    trois de ces marqueurs pour leur bon état de conservation
    et leur apport _ l’analyse du symbolisme du jeu de balle :
    il s’agit des marqueurs 1 et 2 et d’un marqueur que
    Fox appelle marqueur X. Ce dernier se situe _
    l’extrémité sud de la banquette
    sud-ouest.

    Ces trois marqueurs mesurent environ un m_tre dix de
    diam_tre, et présentent plus ou moins le m_me motif: un
    homme de face se tient accroupi et étire ses deux bras.
    Les hommes des marqueurs 1 et X tournent la t_te vers leur
    droite, tandis que celui du marqueur 2 la tourne vers sa gauche.
    L’homme du marqueur 1 est v_tu d’un pagne auquel est
    attachée une t_te de mort aux yeux globuleux. Aux mollets
    et aux poignets, il porte de la fourrure et est coiffé
    d’un chapeau zoomorphe qui ressemble _ un oiseau. Mais
    surtout, il tient dans sa main droite une lance, et dans sa main
    gauche une guirlande d’encens. L’homme du marqueur 2
    porte des ornements au niveau du nez et de la bouche que Fox
    interpr_te comme étant le masque de Tláloc, dieu
    que les Mayas appelaient Chac. A la place de la t_te de mort qui
    décorait la ceinture de l’homme du marqueur 1,
    celui-ci porte un gros disque concentrique. Enfin, il tient dans
    sa main gauche trois fl_ches et dans sa main droite une sorte de
    fleur. L’homme du marqueur X, quant _ lui, ressemble plus
    au personnage du marqueur 1 : il porte deux fl_ches et une
    guirlande d’encens. Qui sont ces hommes et que nous
    apprennent leurs v_tements et attitude ?

    On pourrait penser comme Taladoire qu’il
    s’agit de guerriers et que les marqueurs symbolisent la
    dichotomie entre la paix (la guirlande d’encens, la fleur)
    et la guerre (la lance et les fl_ches). Il est vrai que le
    caract_re militariste est présent sur les marqueurs mais
    ce n’est pas le seul aspect. Il me semble essentiel de
    s’attacher plutôt _ l’image du dieu
    Tláloc, divinité aussi importante et complexe que
    celle de Quetzalcóatl. Plusieurs des aspects de
    Tláloc se retrouvent sur les marqueurs de Tenam Rosario
    dont notamment le rituel guerrier avec la guirlande
    d’encens et les poignets en fourrure. Mais Tláloc
    était surtout connu pour _tre le dieu de la pluie et du
    rituel agraire, le dieu de la fertilité en somme. Cet
    aspect de la divinité se retrouve dans la position
    accroupie des personnages, qui n’est pas fréquente
    dans l’art des basses terres mayas et qui est
    associée dans l’art méso-américain _
    la fertilité, _ la régénération et
    aux sacrifices de sang. Les personnages des marqueurs pourraient
    _tre des pr_tres incarnant le dieu Tláloc, et non pas de
    simples guerriers. Les marqueurs symboliseraient la
    fertilité _ travers la double mention du sang,
    présente dans le rituel guerrier et dans les
    (auto)sacrifices. Le sang étant
    l’élément essentiel de la renaissance et du
    retour _ la vie, le symbolisme du terrain Tenam Rosario ne
    s’orienterait pas dans un sens politique mais porterait au
    contraire les signes d’un symbolisme de la
    fécondité.

    Le marqueur de Chinkultic (Chiapas, Mexique)

    Le marqueur de Chinkultic, trouvé dans la
    cité voisine de La Esperanza, se compose de deux parties :
    une partie centrale mettant en sc_ne un joueur, et une bande
    glyphique l’entourant. Le personnage porte un panache de
    plumes, une genouill_re ainsi que l’épaisse
    protection n° 2. Le joueur renvoie une énorme balle
    avec sa jambe droite et tient dans sa main gauche un panneau
    glyphique. Un autre panneau glyphique se trouve au dessus de la
    balle. Selon Palacios, ce marqueur fait allusion aux astres
    lunaire et solaire. Pour le chercheur mexicain, le joueur est en
    train d’intervertir les deux disques sidéraux (les
    deux panneaux glyphiques), l’un contenant les signes du
    soleil, l’autre ceux de la lune. De l_, il en déduit
    que le marqueur présente une éclipse de soleil,
    événement qui se produit lorsque la lune passe
    entre la terre et le soleil, interceptant les rayons lumineux de
    celui-ci. Un tel événement eut lieu en effet le 16
    juillet 790, l’année que l’on retrouve
    inscrite sur la bande glyphique qui entoure le personnage. Aussi,
    peut-on penser que le jeu aurait un symbolisme astral et que
    joueurs pourraient influer sur le devenir des corps
    célestes.

    9. Les sculptures _
    tenon

    Présentation

    Une sculpture _ tenon est une pierre fichée au
    moyen d’un tenon dans les talus des terrains de jeu de
    balle. Ce type de sculpture est surtout présent dans
    l’aire maya (sur la plaine côti_re pacifique et dans
    les hautes terres en particulier), mais proviendrait, selon
    Parsons, du Mexique central et plus précisément de
    Teotihuacán.

    La fonction des sculptures _ tenon était de
    délimiter l’espace d’action des joueurs,
    c’est _ dire le camp de chaque équipe. On trouve
    généralement deux sculptures qui déterminent
    l’axe transversal central du terrain. Sur les terrains
    H6/2-3 de Toniná et AIII de Copán, trois sculptures
    se répartissent ainsi sur chaque talus. A guaytán 2
    (Progreso, Guatemala), cinq t_tes de serpent ont
    été trouvées mais, selon le principe de
    symétrie, le terrain devait comporter six sculptures.
    Ainsi, dans le cadre du jeu, trois axes transversaux
    correspondant _ la ligne centrale et _ la ligne terminale de
    chaque camp, étaient marqués par les sculptures _
    tenon.

    L’iconographie des sculptures _ tenon

    Je reprendrai les trois groupes auxquels j’ai fait
    appel pour classer les haches : les sculptures zoomorphes, les
    sculptures anthropomorphes, et les sculptures
    anthropozoomorphes.

    Sculptures zoomorphes

    Il s’agit du type de sculptures le plus abondant.
    Trois animaux constituent l’essentiel des
    représentations: le perroquet ou ara, le jaguar et le
    serpent. L’ara est un perroquet qui fait partie des oiseaux
    les plus beaux et les plus bruyants du monde. Son plumage offre
    une variété de couleurs extraordinaire, et
    c’est précisément _ cause de cette parure
    flamboyante que les Mayas considéraient l’ara comme
    le symbole du soleil diurne. Parmi les terrains comprenant une
    sculpture en forme d’ara, il convient de citer le terrain
    AIII de Copán, celui de la Unión (Honduras) ou bien
    dans le département guatémalt_que de Jutiapa les
    terrains n° 1 de Asunción Mita y C de Papalhuapa. Le
    jaguar est un félin mais aussi une divinité
    chthonienne, c’est _ dire du monde souterrain. C’est
    pourquoi il symbolisait le soleil noir, le soleil dans sa course
    nocturne. Il ne serait pas surprenant que cette assimilation
    entre le soleil noir et le jaguar provienne des ocelles de son
    pelage qui ressemblent _ des étoiles. Citons les terrains
    22-23 et 35-36 de Chalchitan (Huehuetenango, Guatemala), A8 de
    Iximché (Chimaltenago, Guatemala) ainsi que celui de
    Zacualpa (Quiché, Guatemala). Enfin, le symbolisme du
    serpent est tr_s varié, mais l’on peut affirmer
    qu’il représente la fertilité et la
    fécondité dans la mesure o_ il est l’image
    des fluides vitaux comme le sang ou l’eau. On trouve des
    sculptures serpentiformes sur les terrains n° 2 de
    Guaytán et Asunción Mita, ainsi que sur le terrain
    B1 de Mixco Viejo (Chimaltenengo, Guatemala) par
    exemple.

    Les sculptures zoomorphes renforcent deux hypoth_ses que
    j’ai émises précédemment et qui ne
    s’excluent pas l’une de l’autre : l’ara
    et le jaguar appuient l’hypoth_se du symbolisme solaire du
    jeu de balle dans ses deux facettes, diurne et nocturne, tandis
    que le serpent témoigne de l’importance du culte de
    la fertilité.

    Les sculptures anthropomorphes

    Les sculptures anthropomorphes peuvent _tre de deux
    sortes :

    * 1. La sculpture représente seulement une t_te
    humaine comme c’est le cas sur les terrains C7 de
    Iximché, n° 1 de Guaytán ou de Finca Pompeya
    (Sacatepequez, Guatemala).

    * 2. La sculpture représente la moitié
    supérieure d’un corps humain, c’est _ dire la
    partie qui va de la ceinture _ la t_te. Elle est tr_s rare car
    seulement deux terrains en comportent. Ils se trouvent tous deux
    dans le nord de l’état mexicain de Chiapas : _ Tenam
    Puente et _ Toniná (terrain H6/2-3). Ces sculptures sont
    connues sous le nom de "captifs" car les personnages ont les
    mains attachées dans le dos.

    L’exemple de Toniná est plus
    intéressant que celui de Tenam Puente pour deux raisons.
    Tout d’abord, le terrain de Tenam Puente ne poss_de que
    deux "captifs" dans l’axe transversal central, alors que le
    terrain de Toniná en compte six. Mais surtout ce dernier
    terrain poss_de d’autres éléments sculpturaux
    comme trois marqueurs d’allée et six panneaux qui
    figurent le bas du corps manquant. Pour bien comprendre et
    analyser ces sculptures _ tenon, il est important d’avoir
    une vue d’ensemble de tous ces éléments du
    terrain.

    Le marqueur central représente un dignitaire
    assis en tailleur qui tient une barre cérémonielle
    dans les mains. Je pense qu’il doit exister un lien entre
    les "captifs" et ce personnage. Tout le probl_me réside
    dans l’identité de ces "captifs". Qui sont-ils ? Des
    joueurs ? Des prisonniers de guerre ? Des victimes sacrificielles
    ? J’écarterai l’hypoth_se des joueurs car rien
    dans leur tenue ne rappelle les v_tements que portent les
    joueurs. L’hypoth_se de prisonniers m’apparaît
    plus plausible en raison du climat politique dans les
    régions du bassin de l’Usumacinta durant le
    Classique récent. Des cités mayas comme Palenque ou
    Yaxchilán perdirent de leur influence, et d’autres
    cités contrôlées par de nouvelles dynasties
    prirent leur essor. Parall_lement, s’accentua un processus
    de décentralisation de l’organisation politique
    maya, c’est _ dire que le pouvoir et
    l’autorité se répartirent entre diverses
    cités _ l’instar du syst_me féodal
    médiéval. Cette situation politique engendra de
    nombreux conflits aux niveaux local et régional. De plus,
    Toniná se trouve dans une région charni_re entre
    les peuples mexicains et les populations de la péninsule
    du Yucatán et du coeur du Mayab. Aussi, j’estime que
    les "captifs" sont des prisonniers de guerre et que le dignitaire
    du marqueur central est le roi de Toniná qui
    régnait en 775 apr_s J.C. comme l’indique la date
    inscrite sur le marqueur.

    Il reste _ se demander pourquoi ces sculptures se
    trouvent sur le terrain de jeu de balle. Le jeu en lui-m_me est
    l’expression d’une lutte, d’un combat o_ deux
    équipes s’affrontent pour gagner. Cette idée
    est donc proche des principes de la guerre. Le terrain de jeu de
    balle me semble _tre – du moins _ Toniná et _ Tenam Puente
    – un "forum politique" pour reprendre l’expression de
    Vernon Scarborough. Le jeu permettrait de régler un
    conflit et serait un substitut _ la guerre, en m_me temps
    qu’il éviterait une effusion de sang inutile : seule
    l’équipe perdante serait faite prisonni_re et
    éventuellement sacrifiée. Certains
    témoignages de l’histoire mexica confirment ce
    caract_re militaire ou guerrier du jeu de balle. Pour
    éviter une nouvelle guerre, le roi de Tenochtitlán,
    Axayácatl (1468-1481), et le roi de Xochimilco
    décid_rent de mettre en jeu, durant une partie, certaines
    terres et propriétés leur appartenant, notamment
    les lagunes et le marché pour le roi de Mexico. Mais le
    roi mexica perdit et, mauvais joueur, fit massacrer son
    adversaire pour s’emparer de ses terres.

    Sculptures anthropozoomorphes

    Eric Taladoire se demande si les sculptures que
    j’appelle anthropozoomorphes n’étaient pas
    l’image d’hommes porteurs de masques. En
    l’état actuel de la question, il est difficile de
    répondre. Cependant, il est vrai que ces sculptures
    représentent des joueurs d’équipes
    différentes, arborant un masque pour se distinguer
    visuellement. Elles rappellent aussi les cél_bres
    "guerriers-jaguars" et "guerriers-aigles" mexicas, mais aucun
    lien direct ne peut _tre établi en raison de la
    réalité chronologique. Elles font penser
    plutôt aux autels olm_ques. Ce sont de grands blocs de
    pierre rectangulaires qui présentent une niche au milieu
    d’o_ émerge un personnage assis. La niche est en
    fait la gueule d’un jaguar qui représente la sortie
    du monde souterrain. Une t_te humaine qui sort de la gueule
    d’un animal symbolise donc l’apparition de la vie et
    de l’homme depuis les profondeurs du monde terrestre.
    Notons enfin que ces sculptures sont localisées
    essentiellement dans les hautes terres et sur la plaine
    côti_re du Pacifique. C’est _ Kaminaljuyú
    (Guatemala, dept) qu’elles sont les plus fréquentes,
    on peut y voir d_s lors une influence du Mexique central et de
    Teotihuacán en particulier.

    10. Les
    anneaux

    Les anneaux ou tlachtemalacates en náhuatl font
    partie des sculptures _ tenon, mais étant donnée
    leur forme particuli_re et leur importance, il apparaît
    judicieux de les étudier _ part. Les anneaux sont de
    lourdes pierres circulaires _ tenon, percées en leur
    milieu d’un trou de diam_tre variable et encastrées
    dans les talus des structures latérales. Peu nombreux, ils
    se localisent essentiellement dans les basses terres du nord, _
    Uxmal, Chichén Itzá, Cobá (Quintana Roo,
    Mexique) et Hochob (Camp_che, Mexique)

    L’origine des anneaux

    Les anneaux se trouvent sur des terrains appartenant _
    des centres situés dans la péninsule du
    Yucatán. Ils datent de la fin du Classique récent
    et du début du Postclassique ancien, époque durant
    laquelle cette région maya reçut l’influence
    des différentes cultures mexicaines (on trouve des anneaux
    _ Tula et sur le terrain n° 1 de Xochicalco). L’origine
    de cet élément du jeu est plus ancienne et remonte
    _ l’époque préclassique. Felipe Solís
    Olguín y a consacré une excellente étude et
    est arrivé _ la conclusion suivante. Les anneaux tels que
    nous les connaissons dans la péninsule du Yucatán
    et dans d’autres régions mexicaines proviennent de
    la fusion de deux éléments : d’un
    côté, les st_les verticales comme celle de La
    Ventilla, et de l’autre, les sculptures _ tenon horizontal
    caractéristiques du Classique, et que nous retrouvons sur
    plusieurs terrains méso-américains. Le centre de
    l’élément discoidal de la st_le se perfora
    peu _ peu et l’on obtint l’anc_tre de l’anneau
    _ tenon. Mais c’est la généralisation du jeu
    de balle pratiqué sur un terrain et l’importance
    accordée aux sculptures _ tenon horizontal qui firent que
    l’usage d’un anneau _ tenon horizontal se
    répandit.

    Certains chercheurs émettent l’hypoth_se
    que des anneaux en bois ont existé, mais qu’en
    raison du matériau périssable dans lequel ils
    étaient fabriqués, il n’en reste plus trace.
    Il est vrai que dans le Popol Vuh, l’anneau fait partie des
    instruments transportables des joueurs au m_me titre que la
    balle, et que sur de nombreux terrains se trouvent des trous
    susceptibles d’accueillir le tenon d’un anneau. Je
    consid_re que cette hypoth_se est tout _ fait recevable bien
    qu’aucune preuve archéologique ne vienne
    l’étayer pour l’instant.

    La fonction des anneaux

    La mise en place d’un anneau de pierre, qui
    était la derni_re chose que l’on posait sur un
    terrain, faisait l’objet de cérémonies
    particuli_res. Le pr_tre Toribio de Benavente, plus connu sous le
    pseudonyme de Motolinia, nous relate ainsi cette
    cérémonie :

    "Acabado de hacer y encalar, un día de buen
    signo, a la media noche, ponían el corazón al
    juego de ciertas hechicerías y ponían en el medio
    del juego y en el medio de las paredes estado y medio
    alto a la parte de dentro unas piedras poco menores que piedras
    de molino (…). Esto hecho, por la ma_ana adornaban dos idolos
    (…), y luego los cantaban allí delante y
    decíanles sus cantares (…)".

    Les anneaux, comme les marqueurs, les panneaux et les
    sculptures _ tenon avaient une fonction matérielle,
    c’est _ dire qu’ils marquaient la ligne centrale du
    terrain et délimitaient les deux camps. De plus, ils
    servaient de buts pour les joueurs. Les chroniqueurs
    s’accordent sur ce point, cependant on est en droit de se
    demander si mettre la balle par le trou de l’anneau
    était possible. En effet, la balle était tr_s
    grosse et le trou assez petit. En outre la position de
    l’anneau sur les talus rendait la chose difficile et les
    joueurs, qui ne devaient pas toucher la balle avec les mains et
    les pieds, ne pouvaient pas viser juste. Les chroniqueurs ont-ils
    bien assisté _ cet exploit ou l’ont-ils simplement
    entendu raconter ? Pour ma part, je reste sceptique vis-_-vis de
    cette information, et je consid_re que si cela pouvait arriver ce
    n’était que le fruit du hasard et d’une
    incroyable chance.

    Toujours est-il que les chroniqueurs rapportent que le
    joueur qui mettait la balle par l’anneau correspondant _
    son équipe, en plus de faire gagner la partie _ son camp,
    avait le droit de s’emparer des "capes" des spectateurs :
    "El que emboca por allí la pelota, que por maravilla
    acontece, porque aún con la mano hay bien que hacer, gana
    el juego, y son suyas, por costumbre antigua y ley entre
    jugadores, las capas de cuantos miran como juegan en aquella
    pared por cuya piedra y agujero entró la pelota, y en
    otra, que serían las capas de los medios, que
    presentes estaban".

    Le symbolisme des anneaux

    Le nombre d’anneaux étant particuli_rement
    réduit dans l’aire maya, il est impossible de
    trouver un th_me iconographique dominant, d’autant plus que
    certains anneaux ne sont pas sculptés comme ceux de la
    structure 17 de Cobá. Je n’aborderai donc ici que
    les anneaux de Uxmal et du terrain 2D1 de Chichén
    Itzá.

    Le centre yucat_que de Uxmal poss_de deux terrains de
    jeu de balle tr_s détériorés mais les
    anneaux ont été relativement
    préservés. Le grand terrain de Uxmal
    présente ainsi deux anneaux de un m_tre de diam_tre
    décorés _ base de glyphes calendariques mayas. Ils
    portent la date de 649 apr_s J.C. mais, comme le souligne
    Marquina, il s’agit d’une date tr_s ancienne qui fait
    s_rement référence _ un événement
    antérieur _ la construction du terrain et des anneaux.
    Peut-_tre faut-il y voir la date de la fondation de Uxmal ? Le
    petit terrain, quant _ lui, n’a donné qu’un
    seul anneau, le deuxi_me ayant disparu. Mais ses
    caractéristiques, uniques dans toute la
    Méso-Amérique, compensent largement ce manque. Cet
    anneau, qui ressemble fortement _ une sculpture _ tenon
    anthropomorphe, représente une t_te humaine avec des yeux
    énormes. Le nez tr_s grand rejoint la bouche
    allongée afin qu’ils se touchent et laissent un
    espace circulaire entre eux et les joues. La forme de cet anneau
    est exceptionnelle.

    Les anneaux du terrain 2D1 de Chichén Itzá
    sont décorés par deux serpents entrelacés
    représentant la Xiuhcóatl, serpent qui conduit le
    soleil dans son cours. C’est un symbole solaire qui
    rappelle Kukulcán-Quetzalcóatl, "la serpiente
    emplumada". Certains chercheurs ont voulu voir dans ces anneaux
    l’ouverture de la terre par laquelle disparaît le
    soleil quand il se couche. Je n’adh_re pas _ cette
    hypoth_se car, comme le souligne justement García Blanco,
    les anneaux devraient _tre horizontaux et non pas verticaux. Je
    crois plus facilement que les anneaux seraient une
    représentation du sexe féminin en raison
    d’autres éléments iconographiques que je vais
    étudier dans le chapitre suivant.

    Partes: 1, 2

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